Le Cytomégalovirus (CMV)
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Le Cytomégalovirus (CMV)

1. Généralités

C'est un virus de la famille des Herpesviridæ ubiquitaire, responsable d'infections souvent asymptomatiques, mais aussi d'infections graves voire mortelles. C'est un virus enveloppé fragile mais il peut persister quelques temps sur des objets inertes (importance du lavage des mains dans la prophylaxie). Comme tous les Herpesviridæ, le virus persiste ensuite à vie dans l'organisme et s'installe sous forme latente et pouvant être régulièrement et fréquemment réactivé. Sa réplication comporte, comme pour les autres Herpesviridæ 3 phases : "très précoce" avec synthèse de protéines activatrices ; "précoce" avec synthèse de protéines enzymatiques dont une DNA polymérase virale ; et "tardive" avec synthèse des composants protéiques de la capside et des glycoprotéines d'enveloppes. La réplication du DNA viral sépare les phases précoces et tardives.

2. Epidémiologie

Virus ubiquitaire avec 50% de séroprévalence dans nos populations (100% dans les pays en voie de développement). Un pour cent des nouveau-nés sont infectés congénitalement et présentent une virurie. Le virus est latent à vie dans les monocytes mais aussi dans les cellules endothéliales vasculaires. Il est à l'origine de réinfections endogènes. Il est très fréquemment retrouvé dans tous les liquides biologiques de l'organisme, sang, sécrétions génitales, sécrétions nasopharyngées, urines, lait maternel....... Il est transmis par contacts intimes : la grossesse, l'accouchement, les soins de maternage dont l'allaitement, les jeux entre enfants en crèche, les rapports sexuels. Il est transmissible par transplantation d'organe et transfusion sanguine.

3. Dans une infection néonatale

a. Inclusions cytomégalique

Le CMV est responsable de la maladie cytomégalique du nouveau-né (MIC) caractérisée par deux séries de symptômes graves d'infection générale (hépatosplénomégalie, ictère, thrombopénie, pneumonie, chez un enfant de petit poids [< 2,5 kg, retard de croissance]) et des signes d'atteinte céphalique. La mortalité est élevée avec de lourdes séquelles psychomotrices et sensorielles. Cela concerne 2 à 5 nouveau-nés sur 10.000 naissances, soit beaucoup plus rare que l'infection inapparente des nouveau-nés qui touche 1 % de tous les nouveau-nés.

La MIC résulte le plus souvent d'une primo-infection en début de grossesse, primo-infection maternelle presque toujours inapparente, donc imprévisible. Parfois l'infection congénitale est soupçonnée puis diagnostiquée sur des signes échographiques : retard de croissance intra-utérin (RCIU), calcifications ventriculaires cérébrales.

b. Transmission materno-foetale

Elle a lieu le plus souvent par réinfection endogène de la mère lors de la grossesse (l'immunodépression est physiologique pendant la grossesse et le CMV est présent au niveau du col chez 1/10 à 1/4 des femmes à la fin de la grossesse.). La contamination du nouveau-né est alors possible mais peu grave en raison de la protection par les anticorps maternels. Cela explique que 1 % de tous les nouveau-nés normaux soient infectés. Il faut noter que 10% de ces enfants asymptomatiques pourraient développer des formes tardives neurosensorielles.

4. Infection chez l'adulte immunocompétent

Chez l'adulte immunocompétent, l'infection, généralement asymptomatique, peut quelquefois se manifester sous forme de fièvre et/ou d'asthénie prolongée, de syndrome mononucléosique (à différencier de la mononucléose à virus Epstein-Barr et de la primo-infection à HIV, de la toxoplasmose), de leucopénie, sous forme d'hépatite aiguë à CMV (à différencier des hépatites A, B, C, E), exceptionnellement sous forme de syndrome de Guillain-Barré, de pneumonie ou d'encéphalite.

5. Infection chez le sujet immunodéprimé

Le CMV est un virus opportuniste chez les sujets immunodéprimés. Il peut s'agir d'une primo-infection par administration à un sujet CMV séronégatif, essentiellement à partir d'une greffe d'organe, de donneur CMV séropositif. Il peut s'agir tout autant d'une réinfection déclenchée par l'immunodépression.

La gravité de l'infection dépend du degré de l'immunodépression. En cas d'immunodépression légère (greffe de rein, greffe de foie) seule la primo-infection est habituellement symptomatique. Chez les sujets plus profondément immunodéprimés (cas des greffes de moelle et du SIDA), primo-infection et réinfection endogène sont également capables de donner des infections graves : encéphalite, choriorétinites (SIDA), ulcérations digestives, glomérulopathies, pneumopathies, pancytopénies par infection médullaire.

6. Diagnostic au laboratoire

a. Diagnostic direct

Par mise en évidence du virus (culture cellulaire) de ces antigènes (antigénémie pp65, réservée au suivi et à la surveillance des pathologies à CMV chez les patients immunodéprimés), et de son génome (PCR qualitative et/ou quantitative).

b. Diagnostic indirect

Le sérodiagnostic pour évaluer le statut sérologique des donneurs et receveurs d'organe et pour dépister les femmes séronégatives avant la grossesse. La détection d'IgM est assez peu spécifique de la primo-infection (des IGM peuvent apparaître lors des réactivations ou réinfections), aussi est-il préférable de disposer d'une cinétique anticorps sur des prélèvements espacés et d'avoir recours lorsque cela est nécessaire à une mesure de l'avidité des IgG.

7. Vaccination

Il n'y a pas de vaccin actuellement au point contre le CMV.

8. Médicaments antiviraux

On dispose de deux médicaments antiviraux, le Ganciclovir (DHPG) et le Foscarnet (PFA), administrés dans le traitement des infections graves des sujets immunodéprimés. Ces deux antiviraux spécifiquement anti-CMV ont des effets secondaires sérieux : neutropénie pour la DHPG, anémie et insuffisance rénale pour le PFA. Un troisième médicament, le Cidofovir, néphrotoxique, est utilisé en cas de résistance aux deux précédents.

9. Prévention de la transmission materno-foetale

La prévention de la transmission materno-fœtale passe actuellement en dehors de tout dépistage systématique par les mesures suivantes :

  1. Connaître le statut sérologique des femmes enceintes (non encore dans les recommandations systématiques...).

  2. Sécurité transfusionnelle : pas de transfusion de sang de donneur séropositif à une femme enceinte séronégative ou à un sujet fragile, immunodéprimé, nouveau-né.

  3. Exclure la primo-infection CMV en cas de syndrome mononucléosique chez une femme enceinte.

  4. Surveillance échographique.

Conclusion

Le CMV est un virus opportuniste chez les sujets immunodéprimés : rétinite (SIDA), encéphalite, pneumonie, infection digestive, pancytopénie chez les greffés de moelle.

Le sérodiagnostic est utile pour classer les donneurs et receveurs d'organes en séropositifs et séronégatifs et pour dépister les femmes séronégatives avant la grossesse.

La détection de l'ADN viral par PCR a transformé le diagnostic des infections du système nerveux (LCR), oculaires (humeur aqueuse) et des infections congénitales (liquide amniotique).

La présence du CMV dans le sang (virémie, antigénémie) annonce la survenue d'une maladie à CMV chez les sujets immunodéprimés. Sa recherche est donc systématique après greffe et au cours du SIDA et conditionne la mise en place de traitement anticipé (préemptif) par ganciclovir ou foscarnet.

La prévention des infections congénitales repose essentiellement sur le dépistage des femmes séronégatives en contact avec des enfants (mère d'un premier enfant, personnels de crèche ou de service de pédiatrie et de maternité). En l'absence de connaissance du statut immunitaire ou en cas de séronégativité chez une femme enceinte ayant déjà un premier enfant, il faut appliquer les mesures suivantes lors des soins à ce premier enfant : se laver les mains après le changement de couches, ne pas sucer la tétine des biberons et les cuillères, et ne pas finir les petits pots.

Actuellement, aucun vaccin contre le CMV n'a pu encore être mis au point.

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