Mycologie médicale
Dermatophytose
Dermatophytoses
Les dermatophytoses sont des mycoses cosmopolites dues aux dermatophytes
Les dermatophytoses intéressent l'épiderme et les phanères
Les dematophytes sont des champignons filamenteux ayant une affinité particulière pour la kératine
Ils appartiennent aux genres Microsporum, Trichophyton et Epidermophyton
Morphologie
En culture, les dermatophytes se développent sous forme de mycélium produisant différents types de spores: microconidies unicellulaires et macroconidies pluriseptées, ...
Le genre Microsporum est caractérisé par des macroconidies en fuseau, à paroi épaisse et échinulée; les microconidies sont piriformes
Le genre Trichophyton est caractérisé par des macroconidies à paroi mince et lisse, à bouts arrondis;
les microconidies sont rondes ou piriformes
Trichophyton schoenleinii ne produit pas de spores.
Le genre Epidermophyton ne comporte qu'une espèce (E. floccosum);
il est caractérisé par des macroconidies en forme de massues, à paroi mince. Il ne produit pas de microconidies
Epidémiologie
Trois groupes: anthropophiles, zoophiles et géophiles.
Les espèces anthropophiles sont des parasites strictement humains. Transmission directe par contact interhumain ou indirecte par le linge, les vestiaires, les piscines.
Espèces anthropophiles: Trichophyton rubrum, T. tonsurans, T. violaceum, T. soudanense, T. schoenleinii, Microsporum audouinii, Epidermophyton floccosum.
Les espèces zoophiles se transmettent à l'homme par contact d'un animal parasité ou de ses poils
Espèces zoophiles: Microsporum canis, transmis le plus souvent par le chat, ou par le chien, Trichophyton mentagrophytes transmis par le cheval ou par les rongeurs, T. verrucosum transmis par les bovidés.
Les espèces géophiles se trouvent dans le sol.
Espèce géophile: Microsporum gypseum.
Clinique
Les lésions à dermatophytes sont localisées sur les cheveux (teignes), sur la peau (épidermophyties), les poils, les ongles (onyxis).
Teignes du cuir chevelu: On distingue les teignes tondantes sèches (microsporie et trichophytie), la teigne favique ou favus, et les teignes suppurées
o Microsporie (Voir schéma)
Lésions rondes, de grande taille (3 cm), peu nombreuses, pseudoalopéciques (cheveux cassés courts), squameuses, fluorescentes en lumière de Wood.
Atteint les enfants (guérison spontanée à la puberté).
Lésion pilaire de type endo-ectothrix (filaments à l'intérieur du cheveu, petites spores (2 µm de diamètre) à l'extérieur.
Agents: Microsorum canis (le plus fréquent), M. audouinii (pratiquement disparu en France).
Possibilité de complication par un herpès circiné si l'agent est M. canis.
o Trichophytie (Voir schéma)
Lésions rondes, de petite taille (0,5 cm), très nombreuses, pseudoalopéciques (cheveux cassés très courts), squameuses.
Atteint les enfants (guérison spontanée à la puberté). Elles sont toutes anthropophiles et très contagieuses.
Lésion pilaire de type endothrix (spores (4 µm de diamètre) à l'intérieur du cheveu.
Agents: Trichophyton tonsurans, T. violaceum, T. soudanense.
o Favus (Voir schéma)
Lésions: godets faviques à la base des cheveux malades. Les cheveux malades ne cassent pas (restent longs) mais finissent par tomber (alopécie définitive). Fluorescence verdâtre des cheveux en lumière de Wood.
Atteint les enfants et les adultes. Strictement humain.
Teigne contagieuse familiale favorisée par le manque d'hygiène.
Lésion pilaire de type endothrix (favique): des filaments mycéliens à l'intérieur des cheveux.
Agent: Trichophyton schoenleinii
o Teignes suppurées
Teignes inflammatoires expulsives; kérion (cuir chevelu) ou mentagre, sycosis (barbe).
Agents: espèces zoophiles, (Trichophyton verrucosum, T. mentagrophytes) ou géophile (Microsporum gypseum)
Epidermophyties: on distingue les lésions en dehors des plis (épidermophytie de la peau glabre: herpès circiné) et les lésions des plis (intertrigos)
o Herpès circiné
Lésion ronde, érythématosquameuse, superficielle, à extension centrifuge (le champignon meurt au centre de la lésion)
Chez les enfants ou les adultes.
Agents: Trichohyton rubrum et Epidermophyton floccosum (tous deux à transmission interhumaine), T. mentagrophytes, Microsporum canis.
o Intertrigos
Epidermophyties des grands plis (pli inguinal ou aisselle): eczéma marginé de Hébra.
Intertrigo interdigito plantaire
Agents: Epidermophyton floccosum, Trichophyton rubrum.
Onyxis
Atteinte des ongles, débute par le bord libre de l'ongle, sans perionyxis
Agent: Trichophyton rubrum.
Diagnostic
Diagnostic mycologique: prélèvement, examen direct, mise en culture sur mileu de Sabouraud + antibiotiques + actidione à 30°C;
identification des cultures (10 à 30 jours après la mise en culture)
Thérapeutique
o Teignes tondantes et favus
Il faut associer un traitement général et un traitement local pendant au moins 6 semaines:
traitement général par la Griséofulvine Griséfuline®, Fulcine® (fongistatique: associer le rasage)
Voir schéma du principe du traitement
Si échec ou intolérance Kétoconazole Nizoral®
traitement local par un antifongique imidazolé en lotion.
Si teigne à Microsporum canis, traiter l'animal contaminant.
o Kérions
Utiliser des anti-inflammatoires et des anti-infectieux et traiter le dermatophyte.
o Lésions de la peau glabre
Un traitement local est généralement suffisant.
o Onyxis
Traitement difficile (6 mois à 1 an):
traitement systémique par la Griséofulvine Griséfuline®, Fulcine® ou par Kétoconazole Nizoral®
Terbinafine Lamisil®
Topiques sous forme de vernis: Ciclopiroxolamine Mycoster®, Amorolfine Loceryl®
Le traitement local comporte également un meulage à intervalles réguliers de l'ongle.
Candidoses
Candidoses
Les candidoses sont des affections cosmopolites dues à des levures du genre Candida.
Leur pathogénicité est fonction de leurs localisations très variées.
Leur fréquence est en augmentation: incidence croissante des facteurs favorisants ( + maladie nosocomiale)
o Facteurs favorisants généraux
âge: prématuré, vieillard
thérapeutiques: antibiotiques, corticoïdes, immunosuppresseurs, psychotropes
états pathologiques: diabète, Hodgkin, sida
états physiologiques particuliers: grossesse
o Facteurs favorisants locaux
humidité, macération
acidité
radiothérapie
Morphologie
Les Candida sont des levures blanches non encapsulées.
La forme levure est unicellulaire et se multiplie par bougeonnement. Possibilité aussi de croissance sous forme de pseudomycélium et de mycélium.
La morphologie est pauvre; l'identification des levures repose en grande partie sur des tests biochimiques.
Candida albicans est l'espèce la plus fréquemment rencontrée en pathologie. Cette espèce est aussi un commensal (saprophyte) du tube digestif.
Parmi les autres espèces rencontrées en pathologie on peut citer: Candida (Torulopsis) glabrata, C. krusei, C. tropicalis.
Epidémiologie
La contamination se fait souvent à partir de la souche (saprophyte) hébergée par le malade; cependant possibilité de colportage en milieu hospitalier par exemple.
Clinique
Candidoses superficielles
o Candidoses cutanées et unguéales
Intertrigo des grands plis
Il peut se rencontrer au niveau de tous les grands plis: interfessiers, inguinal, sous-mammaire, axillaire.
Intertrigo digito-palmaire et digito plantaire
noter le rôle favorisant de l'humidité et de la macération
Onyxis et périonyxis
Candida pénètre par la sertissure de l'ongle. L'onyxis est accompagné de périonyxis.
o Candidoses digestives
Les candidoses digestives sont la porte d'entrée des candidoses viscérales chez les sujets à risque.
Candidoses buccales
Muguet: enduit blanchâtre sur la langue, la face interne des joues, le voile du palais, le pharynx.
Perlèche: fissuration des commissures labiales, à fond blanchâtre
Candidose oesophagienne
L'endoscopie montre un muguet oesophagien
Localisation fréquente chez les malades du sida
Candidose gastro-intestinale
Candidoses anales
s'accompagne souvent d'un intertrigo périanal avec envahissement du sillon interfessier et des plis génito-cruraux et même du siège chez les nourrissons
o Candidoses génito-urinaires
Vulvo-vaginite
Leucorrhées abondantes, grumeuleuses, blanchâtres; prurit vulvaire. muqueuse recouverte d'un enduit blanchâtre.
Coexistence fréquente d'un candidose intestinale.
MST
Balano-posthite
Irritation intense de la muqeuse avec enduit blanchâtre, caséeux dans le sillon balano-préputial; prurit
MST
Candidoses septicémiques et disséminées (Candidoses profondes)
Origine endogène ( foyer digestif) ou exogène (à partir d'un traumatisme vasculaire, cathéter)
symptomatologie pauvre: fièvre inexpliquée, ne cédant pas aux antibiotiques, altération de l'état général.
dissémination: reins, coeur, poumons, yeux, système nerveux, peau.
Terrain évocateur: agranulocytose, réanimation, chirurgie lourde.
Candidoses allergiques
allergie aux métabolites de Candida.
Recherche du foyer.
+ cutanées
+ respiratoires
Diagnostic
o Diagnostic mycologique
Prélevement
lésions cutanées et cutanéo-muqueuses: grattage écouvillonage
Hémocultures
Biopsies: une partie à ensemencer sur Sabouraud, une partie pour histologie.
Examen direct
Montre des levures bourgeonnantes avec ou sans filaments.
Culture
Sur milieu de Sabouraud avec antibiotiques antibactériens à 25°C ou 37°C selon l'origine du prélèvement. Colonies de levures en 24-48 heures.
L'ensemencement sur milieu "ChromAgar" (voir résultat) permet l'isolement et l'identification.
Identification
Candida albicans est identifié rapidement par les tests de blatèse (filamentation en 3 heures à 37°C dans du sérum) et de Chlamydosporulation (en 24 heures sur milieu RAT ou PCB)
Les levures du genre Candida autre que C. albicans sont déterminées par des tests physiologiques et biochimiques (assimilations fermentations)
Voir interprétation des galeries
L'isolement d'une levure n'est pas toujours significatif de sa pathogénicité. Le résultat de la culture est à discuter en fonction des autres éléments du diagnostic.
o Diagnostic immunologique
Dans les atteintes viscérales.
Par recherche d'anticorps (électrosynérèse, immunodiffusion, electroimmunophorèse, immunofluorescence)
Difficultés d'interprétation: montée des anticorps
par recherche d'antigènes circulants (chez les immunodéprimés)
Thérapeutique
o Candidoses cutanées et génito-urinaires
Formes locales des dérivés imidazolés
o Candidoses oro-pharyngées et gastro-intestinales
Nystatine Mycostatine®
Amphotéricine B Fungizone®
Miconazole Daktarin®
Fluconazole Triflucan®
Kétoconazole Nizoral®
o Candidoses profondes
Amphothéricine B Fungizone® en perfusion (milieu hospitalier) éventellement associée à Flucytosine Ancotil®
Fluconazole Triflucan®
Kétoconazole Nizoral®
Cryptococcoses
Cryptococcose
Mycose cosmopolite due à une levure encapsulée: Cryptococcus neoformans
La localisation habituelle est méningo-encéphalique.
Morphologie
Levure ronde de 3 à 8 µm de diamètre, entourée d'une capsule mucopolysaccharidique, caractéristique.
La culture sur milieu de Sabouraud est légérement ocre.
La capsule est bien mise en évidence par montage dans l'encre de chine diluée et observation au microscope.
Il existe deux variétés (C. neoformans var. neoformans et C. neoformans var.gattii répandue en Afrique noire); elles correspondent à deux espèces sexuées (basidiomycètes) et à 4 sérotypes.
Epidémiologie
Cryptococcus neoformans est un champignon saprophyte dans le milieu extérieur, opportuniste:
la cryptococcose survient le plus souvent chez les sujets immunodéprimés (sida, en particulier) ou atteints d'hémopathies sévères.
Cryptococcus neoformans est souvent retrouvé dans les fientes d'oiseaux, de pigeons en particulier.
La contamination est aérienne, par voie pulmonaire.
Clinique
o Cryptococcose pulmonaire
Correspond à la primo-infection, presque toujours asymptomatique. Sinon simule un syndrome grippal.
o Cryptococcose méningo-encéphalique
Cryptococcus neoformans a un tropisme pour le système nerveux central.
Syndrome méningé incomplet: céphalées, nausées, fièvre peu importante, raideur de la nuque (inconstante).
Troubles du caractère, de la mémoire, du sommeil.
Hypertension intracranienne.
o Cryptococcose cutanée
Résulte d'une dissémination hématogène.
Papules acnéiformes, ulcérations sur le visages, les extrémités.
o Cryptococcose généralisée
Fréquente au cours du sida.
La levure est retrouvée dans les hémocultures, les urines, les liquides de lavage broncho-alvéolaires, le L.C.R. ...
Diagnostic
o Diagnostic mycologique
Prélèvements: LCR, urines, lavages broncho-alvéolaires, pus, biopsies
Examen direct: présence de levures encapsulées (mise en évidence par montage dans l'encre de chine diluée)
Culture à 37°C sur milieu de Sabouraud sans actidione: colonies beiges, muqueuses en 3 à 5 jours.
Identification: présence d'une capsule, auxanogramme, uréase +.
o diagnostic immunologique
Recherche d'antigène capsulaire dans le LCR, le sérum, l'urine, le LBA (test d'agglutination de billes de latex sensibilisées par des anticorps anti-cryptocoques)
Thérapeutique
Amphotérine B Fungizone® IV en perfusion lente (en milieu hospitalier)
Flucytosine Ancotil® diffuse bien dans le LCR, possibilité de résistance (association synergique avec Amphotéricine B)
Fluconazole Triflucan® diffuse bien dans le LCR
Itraconazole Sporanox
Pityriasis versicolor
Pityriasis versicolor
Affection fréquente de la peau due à Malassezia furfur
Morphologie
Malassezia furfur est une levure lipophile difficile à cultiver. Chez l'homme, on la trouve à l'état de commensal sur la peau.
Sa manifestation clinique la plus fréquente est le pityriasis versicolor.
Dans les squames on trouve des grappes de 10 à 30 éléments ronds et des filaments courts, épais flexueux.
Epidémiologie
Malassezia furfur est un commensal de la peau.
Clinique
macules souvent confluentes de couleur chamois (plus clair ou plus foncé que la peau).
squames grasses se détachant facilement au grattage.
Les lésions siègent habituellement sur le haut du thorax, les avant-bras, le cou, quelquefois sur le visage.
Diagnostic
Aspect clinique des lésions.
Fluorescence à la lumière de Wood.
Prélèvement des squames à l'aide de cellophane adhésive, coloration au bleu de toluidine et examan microscopique.
On ne cherche pas à cultiver le germe.
Thérapeutique
Traitement local à l'aide d' antifongiques imidazolés: Econazole Pévaryl®, Kétoconazole Kétoderm®,
ou d'une suspension de sulfure de sélénium Selsun®
Les rechutes sont fréquentes.
Aspergilloses
Aspergillose
Les aspergilloses sont des mycoses cosmopolites le plus souvent pulmonaires, provoquées par un champignon filamenteux (moisissure) du genre Aspergillus.
Ce sont des affections opportunistes.
Morphologie
Les Aspergillus sont des moisissures banales.
A l'état saprophytique (dans la nature ou sur milieu de culture) ils sont caractérisés par
un mycélium rampant producteur de
filaments dressés renflés à l'extrémité (vésicule) et
porteurs de phialides (en forme de bouteille) qui produisent de très nombreuses spores
filament dressé, vésicule, phialide et spores réalisent la tête aspergillaire
Les cultures d'Aspergillus sont colorées: vert pour A. fumigatus, jaune pour A. flavus, noir pour A. niger.
Epidémiologie
Aspergillus fumigatus est responsable de 80% des aspergilloses humaines.
Les Aspergillus produisent de très nombreuses spores à dissémination aérienne.
Ce sont des oppotunistes: ils se développent s'ils rencontrent des conditions favorables: cavité résiduelle pulmonaire (séquelle de tuberculose par exemple) ou déficit immunitaire.
Clinique
o Aspergillome pulmonaire
Chez le sujet sain, les spores inhalées sont éliminées par l'appareil muco-ciliaire ou détruites par les macrophages alvéolaires.
Si ces mécanismes sont déficients, dans une cavité résiduelle d'une anciennne lésion, la spore peut germer et fabriquer une "truffe aspergillaire"
L'installation d'A fumigatus est favorisée par son caractère thermophile (il pousse jusqu'à 45°C)
Les signes cliniques sont des hémoptysies, de la toux, des expectorations de la fièvre, de l'asthénie, un amaigrissement.
L'examen radiologique montre une image caractéristique "en grelot".
o Aspergillose diffuse invasive
Elle correspond au développement du champignon en plein parenchyme pulmonaire chez les sujets immunodéprimés (greffés par exemple).
Fréquemment mortelle
Possibilité de généralisation avec localisations rénale, cérébrale, hépatique, cardiaque.
o Aspergilloses allergiques
+ Alvéolite allergique extrinsèque (type poumon de fermier)
+ Asthme aspergillaire
+ Aspergillose broncho-pulmonaire allergique (ABPA): asthme avec eosinophilie pulmonaire.
o Aspergilloses localisées extra-pulmonaires
Les Aspergillus peuvent aussi se développer dans le conduit auditif (otomycoses), dans les sinus (aspergillose sinusienne) ou sur la peau des grands brûlés.
Diagnostic
L'isolement d'Aspergillus est insuffisant pour poser le diagnostic (Aspergillus est une moisissure banale)
Le diagnostic repose sur
o examen radiologique, fibroscopie
o examen anatomopathologique
o diagnostic immunologique
Recherche d'anticorps circulants
Double diffusion en gel, immunoélectrophorèse, électrosynérèse complétées par la mise en évidence d'activités catalasique et chymotrypsique supportées par certains arcs de précipitation.
ELISA
Hémagglutination passive
Recherche d'antigènes anti-aspergillaires circulants
La recherche de fractions antigéniques d'Aspergillus (galactomannanes, glycoprotéines) permet le diagnostic chez les sujets en aplasie.
Thérapeutique
o Aspergillome:
chirurgie (+ antifongiques)
o Aspergillose invasive:
Amphotéricine B Fungizone® en perfusion (milieu hospitalier)
Itraconazole Sporanox®