Les souffrances psychiques de l'adolescent : la place du pharmacien d'officine auprès du jeune (prévention, détection, orientation, suivi)

La prise en charge, l'orientation, le suivi

Une fois que le trouble est repéré et qu'un nom est posé sur le problème, la prise en charge du jeune se fait de diverses manières, suivant la situation. Si c'est l'entourage de l'adolescent qui se rend compte du souci, le premier interlocuteur qu'elle contacte est le médecin traitant. C'est à lui ensuite d'évaluer la prise en charge la plus adaptée, et l'orientation nécessaire vers un tiers ou non.

La prise en charge d'un adolescent qui souffre

Lorsqu'un adolescent souffre, et que son entourage parvient à détecter cette souffrance, la première chose à faire est d'évaluer l'intensité du trouble qui touche ce jeune, et l'impact que le problème a sur lui, dans sa vie quotidienne. Si l'adolescent est au plus mal et que sa situation relève d'une urgence somatique, l'hospitalisation est alors proposée (voire imposée) d'emblée. En revanche, si le problème peut être traité en ambulatoire, ce qui est souvent préférable, un projet de soins est proposé, faisant intervenir de nombreux professionnels, de disciplines très variées. Il se forme ainsi un réseau de soins autour de l'adolescent, dont les acteurs agissent en synergie pour son rétablissement. Le premier mode d'intervention auprès du jeune est psychologique. A cela peut s'ajouter une prise en charge médicamenteuse, mais dans des cas très précis, et avec un suivi rigoureux et une réévaluation régulière de l'intérêt du traitement. En effet, les médicaments psychiatriques ne sont pas recommandés en première intention chez les adolescents, et peu d'études reposent sur leur utilisation dans cette classe d'âge.

Quelle place pour les médicaments chez un adolescent ?

Les médicaments psychotropes chez l'enfant et l'adolescent ont longtemps été considérés comme dangereux. En fonction de la situation et du jeune auquel ils s'adressent, les principes médicamenteux peuvent réellement avoir une utilisation justifiée.

Peu d'études portent sur l'utilisation de ces médicaments chez les jeunes. Les substances qui les composent ne sont pas anodines, et elles peuvent avoir un retentissement physique et psychologique important sur celui qui les utilise, c'est pourquoi il est nécessaire que les études se développent à ce sujet. Aux Etats-Unis, des propositions sont faites aux laboratoires pharmaceutiques d'échanger un prolongement de brevet pour leur molécule contre des études chez l'enfant et l'adolescent de cette même molécule, en vue d'étendre l'indication de son utilisation à cette population. Chacun tire parti de cet échange.

  • Dans la dépression

    Le traitement par antidépresseur chez l'adolescent est possible, sous couvert d'une surveillance accrue et régulière. Ces médicaments ont montré une véritable efficacité, et doivent être utilisés lorsque cela est nécessaire.

    Contrairement à l'utilisation des antidépresseurs tricycliques dans la population adulte, ce sont les IRSS (Inhibiteurs Spécifiques de la Recapture de la Sérotonine) qui sont à privilégier chez les adolescents. Cela permet d'insister sur le fait que l'adolescent n'est pas un petit adulte, et qu'il est à considérer comme tel.

  • Dans l'anorexie mentale

    Antidépresseurs, neuroleptiques ou autres molécules n'ont pas montré d'efficacité probante dans la reprise de poids de l'adolescent anorexique. Si la prescription de psychotrope s'impose, il faudra s'assurer d'un bon statut nutritionnel du patient et d'une surveillance métabolique et cardiovasculaire intensive. Les neuroleptiques atypiques ont un rapport bénéfice/risque très favorable si les indications sont bien posées et que les règles élémentaires de prudence sont respectées. Il ne faut donc pas condamner l'utilisation de médicaments pour les patients souffrants d'anorexie mentale. La mise en place d'un tel traitement doit se faire de manière réfléchie.

  • Dans la boulimie

    Concernant la boulimie, il n'existe pas d'étude concernant l'utilisation de médicaments, chez les adolescents, à l'heure actuelle.

  • Dans les conduites addictives

    L'utilisation des médicaments reste limitée. Leur but est d'aider au sevrage et/ou au maintien de l'abstinence en se substituant à la drogue d'origine ou en contrecarrant ses effets physiologiques et subjectifs.

Les médicaments utilisés en psychiatrie de l'adolescent ne sont pas très nombreux. Le manque d'études fait que les médecins les plus à même de prescrire ces molécules ne le font pas, tandis que les médecins généralistes ou pédiatres, qui semblent moins spécialistes dans ce domaine, le font. Le médicament peut avoir sa place chez l'adolescent, mais seulement lorsque l'indication de sa prescription est réellement présente. Un mésusage de ces médicaments est plus nocif que l'absence de traitement médicamenteux. Mais il est des situations où leur utilisation est plus que légitime. Tout réside dans l'évaluation du rapport bénéfice/risque du médecin qui prend en charge le jeune en souffrance.

L'orientation des jeunes vers d'autres professionnels et le suivi

Lorsqu'une souffrance est repérée chez un adolescent, une prise en charge rapide est nécessaire pour éviter que le trouble s'aggrave. En fonction de la personne qui repère le problème, l'orientation du jeune vers un professionnel du milieu de la santé sera différent.

Si c'est la famille ou les amis qui découvrent le souci, les premiers spécialistes vers lesquels ils l'orienteront seront le médecin généraliste la plupart du temps, voire le pharmacien, acteur de santé de proximité, en seconde intention.

Ensuite, médecin et pharmacien sont plus à même de conseiller le jeune de consulter tel ou tel spécialiste, lorsqu'ils jugent que cela est nécessaire.

Le pharmacien orientera le jeune vers le médecin généraliste la plupart du temps, mais également vers les lieux d'accueil et d'écoute gratuits et anonymes pour les jeunes. C'est le cas des Maisons des Adolescents par exemple, ou encore des Centres de Planification Familiale pour tout ce qui a attrait à la sexualité. Ces structures semblent moins effrayer les adolescents que le contact avec un médecin, que les parents pourraient également connaître, lorsque les questions qui tracassent le jeune ne doivent pas être connues par la famille par exemple. Le pharmacien peut également aider le jeune à rétablir le dialogue avec ses parents, et l'inciter à discuter avec son environnement familial. Les parents sont un appui très important pour l'adolescent, même s'il ne s'en rend pas forcément compte. Dans le cas d'une demande d'aide à l'arrêt de consommation de tabac ou d'alcool par exemple, le pharmacien peut orienter directement le patient vers un tabacologue ou un alcoologue, sans nécessairement préconiser de consulter son médecin généraliste en première intention. Enfin, il me semble important que le pharmacien puisse mettre à disposition de tous des listes de numéros verts et d'associations, à travers des documentations papiers par exemple. Ces structures apportent un véritable soutien aux jeunes, et il ne faut pas oublier de leur en parler !

Le médecin généraliste est quant à lui le pilier de l'orientation du jeune. C'est à lui que revient le choix d'orienter l'adolescent vers un spécialiste du trouble qui le touche. C'est alors que de nombreuses solutions se présentent : psychologue, psychiatre, diététicienne, gynécologue, tabacologue, alcoologue... Le médecin généraliste n'a pas le temps de traiter les pathologies trop spécifiques de ses patients. C'est pourquoi l'orientation vers un professionnel qualifié pour résoudre le problème repéré, ou vers un institut de prise en charge du trouble est intéressante.

  • Les associations et numéros verts

    En plus des spécialistes et des établissements de prise en charge des adolescents, il ne faut pas oublier tous les bénévoles qui œuvrent pour apporter leur soutien à ces jeunes. De nombreuses associations existent, ainsi que des numéros verts, gratuits, pour aider les adolescents dans leur combat quotidien. Ces dispositifs sont surtout intéressants dans le suivi des jeunes, ainsi que pour apporter de l'information en réponse à leurs questions. Il en existe un très grand nombre, pas forcément bien connus de tous.

    • Santé des Jeunes

      • Fil Santé Jeunes : 0 800 235 236 ou 32 24 (appel gratuit) - http://www.filsantejeunes.com/ (écoute, information, orientation des jeunes en matière de santé physique, psychique et sociale, par des psychologues et des médecins)

      • Portail Santé Jeunes : 32 24 - http://portail-sante-jeunes.fr (identiques au fil santé jeunes)

      • Point Accueil Ecoute Jeunes (PAEJ) : pas d'établissement sur Angers, Nantes : 02 40 35 47 73 (lieu d'accueil, d'écoute et de parole pour jeunes en difficultés. Prévention des conduites à risque)

      • Maison des adolescents : Numéro spécifique à chaque établissement, Angers : 02 41 80 76 62. Site internet en cours d'élaboration (accueil, écoute, évaluation, orientation des jeunes de 13 à 20 ans)

    • Dépression

    • Suicide

      • Suicide Ecoute : 01 45 39 40 00 - http://suicide.ecoute.free.fr (écoute des personnes confrontées à la problématique du suicide)

      • SEPIA : Suicide Ecoute Prévention Intervention auprès des Adolescents, 0800 88 14 34 (n° vert, gratuit, 24h/24) - http://www.sepia.asso.fr/ (prévention du suicide chez l'adolescent et accompagnement du jeune en souffrance)

    • Troubles du comportement alimentaire

      • Anorexiques Boulimiques Anonymes (ABA): 06 16 39 28 69, contact sur Nantes, http://abafrance.free.fr/ (soutient, aide, dialogue pour les personnes atteintes de TCA)

      • Enfine : 01 40 72 64 44 (lundi et jeudi de 21h à 22h30) - http://www.enfine.com/ (information, écoute, prévention autour des TCA. Orientation vers des spécialistes si besoin)

    • Addictions

      • Ecoute cannabis : 0 811 912 020 (coût d'une communication locale depuis un poste fixe) (aide et soutien, écoute et prévention, information, orientation vers des professionnels compétents)

      • Site du ministère de la santé : http://www.drogues.gouv.fr/ (information et renseignements sur le cannabis et autres drogues, leurs effets, leurs dangers)

      • Tabac info services : 39 89 - http://www.tabac-info-service.fr/ (témoignages et aides pour arrêter de fumer)

    • Sexualité et contraception

      • Ecoute Sexualité Contraception : Numéro sur le site Internet en fonction du centre. Angers : 02 41 88 70 73 - http://www.planning-familial.org (information, conseil ou réponses liés à la sexualité)

      • Ligne Azur : 0 810 20 30 40 - http://www.ligneazur.org (prévention des conduites à risques relatives au VIH et aux autres IST, auprès des jeunes s'interrogeant sur leur identité sexuelle ou ayant des difficultés à la vivre)

    • La famille

      • Ecoute-famille : 01 53 06 30 43 - http://www.unafam.org (accueil, soutien, information des familles confrontées au trouble psychique d'un des leurs)

      • Phare Enfants-Parents : 0810 810 987 (n° Azur) - http://www.phare.org (écoute des parents et des enfants en difficulté. Information et orientation contribuant à combattre le mal-être des jeunes)

La prise en charge, l'orientation et le suivi d'un adolescent en souffrance psychique demande un travail autour d'un réseau de soins, dans le domaine médical, psychologique, mais également social. C'est effectivement la multidisciplinarité qui permet d'appréhender le problème dans sa globalité, et de le gérer au mieux.

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