Parasitoses internes

Leishmaniose

Introduction

Ce sont des parasitoses dues à des protozoaires flagellés de l'ordre des Kinétoplastidés, de la famille des Trypanosomatidés, et du genre Leishmania.

Elles touchent de nombreux mammifères (dont l'homme), qui constituent des réservoirs naturels du parasite.

Le vecteur de la maladie est un moustique présent dans de nombreuses régions du globe, le phlébotome.

Les leishmanioses sont largement répandues dans le monde, et constituent donc un problème de santé publique.

Un large éventail d'espèces sont en cause, d'où une diversité des signes cliniques.

Données épidémiologiques

Il y a différentes formes de leishmanioses, bien qu'une seule soit présente en France métropolitaine.

Leishmaniose viscérale

Cette forme est endémique de plusieurs foyers : Chine, Asie centrale, Méditerranée, Inde, Afrique de l'Est, Brésil.

Elle a beaucoup progressé à cause de la pandémie du VIH.

Leishmaniose cutanée

Retrouvée en Amérique centrale, Amérique du Sud, Afrique, Moyen-Orient, Asie centrale, Méditerranée.

Leishmaniose cutanéo-muqueuse

On la trouve au sud du Mexique et Nord de l'Argentine.

En France, il y a présence dans le sud de leishmanioses dues à Leishmania infantum, espèce également responsable de la leishmaniose canine et présente sur le pourtour méditerranéen.

Il semblerait que le renard soit également un réservoir du parasite, et le rôle du chat à ce sujet est encore mal élucidé.

Les leishmanioses sont de type « viscérale » en France. Le nombre de cas autochtones est estimé à 22 par an (InVS). À noter que le nombre de cas de leishmanioses canines est en augmentation.

Cycle de vie du parasite et transmission à l'homme

Un mammifère parasité contient des formes amastigotes du parasite, c'est-à-dire des organismes ovalaires ou arrondis de deux à six micromètres de diamètre avec un noyau, un kinétoplaste (contenant de l'ADN extranucléaire), et une ébauche de flagelle.

Ce stade est intracellulaire, et est situé principalement au niveau des cellules phagocytaires.

Le phlébotome s'infecte au cours de la piqûre, en absorbant des amastigotes en même temps que le repas sanguin.

Ceux-ci évoluent en formes promastigotes dans le tube digestif du moustique : ils deviennent allongés, de 10 à 25 micromètres de long, avec noyau central, kinétoplaste antérieur et flagelle libre postérieur.

Puis il y a multiplication et différenciation en promastigotes métacycliques (métacyclogénèse), qui migrent vers les trompes pour être inoculés à un mammifère lors d'une prochaine piqûre par le phlébotome.

À noter que les molécules actives contenues dans la salive du moustique induisent une vasodilatation et une immunodépression propices à cette inoculation.

Suite à celle-ci, les promastigotes métacycliques sont phagocytés par les cellules immunitaires de l'hôte, notamment les macrophages. Ils sont capables de survivre aux hydrolases lysosomiales et peuvent se multiplier après transformation en amastigotes, jusqu'à éclatement de la cellule hôte. Les formes amastigotes iront infecter d'autres cellules phagocytaires ou bien des tissus, selon le tropisme de l'espèce concernée.

Signes cliniques

Leishmaniose viscérale

Le début variable : il peut être progressif ou brutal.

On observe comme signe le plus précoce une fièvre irrégulière et modérée, avec des pics élevés (jusqu'à 40 °C), par vagues de plusieurs semaines.

Le patient est également caractérisé par une anémie (pâleur bien visible), un amaigrissement, et des hyperplasies : hépatosplénomégalie (augmentation du volume du foie et de la rate), adénopathies (augmentation de volume d'un ganglion lymphatique).

Avec le temps, d'autres atteintes peuvent survenir :

  • Digestives : langue saburrale (blanchâtre), nausées et vomissements, anorexie, diarrhées.

  • Pulmonaires : Toux sèche et irritative, râles.

  • Troubles hémorragiques : saignement gingival, épistaxis (saignement de nez), voire purpura plus rarement (lésions au niveau de la peau ou des muqueuses).

Au niveau sanguin, on peut observer :

  • Une anémie, qui s'aggrave progressivement.

  • Une neutropénie (déficit en globules blancs de type polynucléaires neutrophiles) qui peut aller jusqu'à l'agranulocytose (déficit très intense).

  • Une thrombopénie (déficit en plaquettes).

C'est pourquoi la mort peut survenir par infection ou hémorragie.

Leishmaniose cutanée (pas observée en France)

Cette forme se caractérise par des lésions cutanées (uniques le plus souvent, quelquefois multiples) recouvertes de squames blanchâtres, qui augmentent régulièrement de taille au cours de la progression de la leishmaniose.

On a alors une ulcération avec formation d'une croûte plus ou moins épaisse (pour la forme sèche, la forme tuberculoïde ne présentant pas d'ulcération).

On peut aussi observer des nodules sous-cutanés témoignant de la présence du parasite au niveau des voies lymphatiques.

Une surinfection bactérienne est possible.

En général la lésion guérit spontanément après quelques mois voire années.

Leishmaniose cutanéo-muqueuse (pas observée en France)

Elle débute de la même manière que la leishmaniose cutanée, mais après la guérison de la lésion, l'infection reste latente pendant des années. Puis une atteinte muqueuse peut se produire.

Elle commence au niveau nasal : il y a apparition d'un granulome inflammatoire à la cloison nasale, ce qui se caractérise chez le patient par une congestion nasale et parfois une épistaxis. La cloison nasale est envahie (et détruite), pour s'étendre à la partie osseuse : le nez du malade est dit « en nez de tapir ».

La muqueuse buccale est atteinte à son tour, puis les lèvres, le palais, et le larynx.

Les lésions sont graves et peuvent avoir un retentissement important sur l'état psychologique du patient, de plus la nécrose du larynx provoque une dysphagie, elle-même entraînant un risque de surinfection bronchopulmonaire.

Diagnostic

On cherche à mettre en évidence le parasite ou de l'ADN parasitaire.

Suivant le type de leishmanioses, les prélèvements sont réalisés à différents niveaux.

On peut réaliser un frottis sanguin pour mettre en évidence des formes amastigotes dans les monocytes, ainsi que des parasites extracellulaires.

Une biopsie permet de révéler la structure histologique du granulome, caractéristique (leishmanioses cutanées et cutanéomuqueuses).

Pour plus de sensibilité, on peut mettre en culture les prélèvements (mais c'est une méthode lente).

On réalise de plus en plus souvent une PCR, qui apporte une très grande sensibilité et spécificité diagnostique.

Enfin, on peut faire un diagnostic immunologique.

Traitement

Il est difficile, car dépend de l'espèce (nombreuses espèces). Il y a de plus apparition de résistances aux molécules employées, et les médicaments disponibles sont assez toxiques (et, donc, délicats à utiliser).

Antimoniés pentavalents (contiennent de l'antimoine)

Par exemple, l'antimoniate de méglumine (Glucantime®).

Le mécanisme d'action des antimoniés est encore mal connu, mais, visiblement, il a un rôle d'inhibition de la synthèse d'ATP et de perturbateur du métabolisme des acides gras.

Les antimoniés ont de nombreux effets secondaires, et sont contre-indiqués en cas d'insuffisance rénale, cardiaque et/ou hépatique.

Le plus souvent, ils sont administrés par voie intramusculaire, parfois intraveineuse ou par injection dans une zone proche de la lésion.

La posologie usuelle est de 20mg/kg/jour, en administration progressive, pendant 20 jours pour la leishmaniose viscérale, et 28 jours pour les autres formes.

Amphotéricine B (Fungizone®)

Molécule antifongique et antileishmanien, elle agit en se fixant sur les stérols membranaires, ce qui entraine une modification de la perméabilité membranaire.

Elle présente une toxicité rénale et hématologique.

L'administration se fait par voie intraveineuse (perfusion de 1mg/kg), un jour sur deux, sous surveillance médicale (en raison d'un risque d'intolérance, et de la toxicité rénale).

L'efficacité est comparable à celle des antimoniés.

On peut aussi l'utiliser sous forme de liposomes (Ambisome®), l'avantage étant une meilleure accumulation au niveau des tissus infectés (forme viscérale).

Miltéfosine

C'est un phospholipide alkylé, actif au niveau membranaire, qui possède aussi une activité immunomodulatrice.

Bonne efficacité, tolérance correcte. Contre-indiqué chez la femme enceinte.

Elle est administrée par voie orale (comprimés de 50 mg), à raison d'un ou deux comprimés par jours pendant 4 semaines.

Ce traitement est disponible en Inde et en Allemagne pour la forme viscérale. En France, cette molécule est utilisée pour se propriétés anticancéreuses.

Pentamidine (Pentacarinat®)

L'iséthionate de pentamidine est une diamine aromatique. Elle inhibe la synthèse de l'ADN parasitaire.

On l'utilise en première intention dans certaines formes de leishmanioses cutanées.

L'administration se fait par injection intramusculaire (4mg/kg par injection), à raison de 3 à 5 injections au total et 2 à 3 jours d'intervalle.

Prophylaxie

Au niveau individuel, il faut éviter la piqûre du phlébotome par l'emploi d'insecticides et de répulsifs (à appliquer sur la peau et les vêtements). Les moustiquaires doivent être employées dans les zones ou la leishmaniose est endémique.

Pour prévenir la leishmaniose canine, il existe des colliers insecticides et, bientôt, un vaccin canin sera commercialisé (CaniLeish®).

Au niveau collectif, des programmes de luttes ont été mis en place dans certaines zones endémiques, pour agir sur différents paramètres, à savoir sur les vecteurs, les réservoirs et le milieu.

Leishmaniose en image

Leishmania sp., forme amastigote
Amas de Leishmanias
Leishmania dans une biopsie de lésion cutanée

Références

Sources documentaires

J.-P. Dedet, Leishmanies, leishmanioses : biologie, clinique et thérapeutique. EMC (Elsevier Masson SAS) Maladies infectieuses (2009).

J.-P. Dedet, les leishmanioses en France métropolitaine, InVS. http://opac.invs.sante.fr/doc_num.php?explnum_id=193 (Page consultée le 27 mars 2012).

Crédit images

Librairie d'images de parasites du CDC. DPDx — CDC Parasitology Diagnostic Web Site (http://www.dpd.cdc.gov).

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